Deuil : « La douleur rencontre une certaine douceur au fil des années »

Artcile tiré de caf.fr

Vies de famille : Pouvez-vous nous présenter votre film ?

Damien Boyer : Nous suivons le parcours d’Amande dans une partie de son processus de deuil. Cette maman a perdu Gaspar, son fils décédé à l’âge d’un an après une maladie grave. Soutenue par Guillaume, le papa, Amande se lance un défi dans notre film : rejoindre la montagne des Trois Becs, dans la Drôme, tout en rencontrant sur son chemin des personnes qui, comme elle, ont perdu un enfant. Par ces exemples de vies et témoignages, nous souhaitons donner des clés aux personnes qui vivent cette épreuve, et leur montrer ce qui peut leur faire du bien.

Ce documentaire traite d’un sujet difficile : la mort d’un enfant. Est-ce toujours tabou d’en parler ?

Plus que jamais ! Il y a un paradoxe en France : il y a un mort par minute – cela représente près de 600 000 décès chaque année, soit des millions de personnes endeuillées. Et pourtant, on en parle peu car on a plus que jamais peur de mourir ! On est tellement dans le déni qu’il n’y a même pas de mot pour désigner les parents qui perdent un enfant, alors même que l’on a l’une des langues les plus riches du monde. C’est très douloureux pour eux, car ils ont l’impression que leur peine n’est pas reconnue, ni comprise.

Quels enseignements tirez-vous de ces témoignages ?

L’absence, la mort, ça nous détruit, ça nous fait mal. La bonne nouvelle ? La douleur rencontre une certaine douceur au fil des années. Le deuil est notre ami et nous aide à traverser la mort. Pour autant, on n’oubliera jamais son enfant. Vous pouvez rire, vous amuser, danser, mais jamais vous ne l’oublierez.

Qu’est-ce qui peut aider les parents endeuillés ?

Tout d’abord, les rituels, qu’ils soient religieux ou non. Ils sont importants car ils permettent d’exprimer de grandes émotions autrement que par des mots : mettre des photos de son enfant, avoir un doudou dans le sac à main, célébrer l’anniversaire de sa mort… Ces rituels ont quasiment disparu de notre société, mais l’idée est de s’en réinventer et d’utiliser des images pour exprimer ce qu’on n’arrive pas à dire. Ensuite, il faut rester bien entouré par plusieurs proches, cinq vrais appuis au minimum et ce, pendant des années.

Cette situation est également difficile pour l’entourage, qui ne sait pas toujours comment réagir.

L’entourage ne doit pas hésiter à demander directement aux personnes concernées ce qu’elles attendent. Il faut savoir que la notion du temps change pour les endeuillés : ils ont besoin d’un soutien pendant des années ! Ensuite, il faut se dire qu’on peut prononcer le nom du défunt : c’est terrible de voir que les gens évitent le sujet.

Le documentaire Et je choisis de vivre a-t-il aidé Amande ?

Ce qui l’aide le plus, ce sont les suites. De voir que son petit Gaspar permet aujourd’hui d’avoir une association, d’aider d’autres parents, que l’histoire de son fils marque les cœurs, malgré des douleurs et le manque qui sera ressenti à vie.

Quelles suites allez-vous donner à ce documentaire ?

Nous avons créé « Mieux traverser le deuil », une association dont le but est de mieux accompagner les personnes endeuillées. Nous sommes en train de développer un site Internet avec de nombreuses informations, des pastilles vidéo, à destination des parents, de leurs proches et des professionnels pas forcément formés : action sociale, funéraire, médical, Education nationale… Un numéro vert sur le deuil proposera prochainement une écoute. Enfin, nous sommes en lien avec des associations, notamment pour renvoyer vers les bons interlocuteurs sur chaque territoire. Car on se rend compte que pour mieux traverser le deuil, il faut le vivre ensemble, en communauté.

 

"Et je choisis de vivre": Sortie en salles le 5 juin.
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