Eduquer à deux: pas si facile !

Auteur : Brigitte Cassette

Dans le couple parental, chacun-e est le résultat de son histoire, son passé, son caractère. Normal alors de constater les différences face à l’éducation de l’enfant. L’autorité parentale l’illustre bien : l’un des parents est souvent plus cadrant, plus strict sur les limites. L’autre plus à l’écoute, négociant plus, plus enrobant. Les deux autorités sont utiles mais parfois elles se heurtent, faisant naitre des conflits entre les deux parents. Entre le parent qui trouve « que si le petit de défoule en sautant sur le canapé, il dormira mieux » et celui qui s’insurge « un canapé n’est pas fait pour sauter », il y a un enfant vivement intéressé par cet émotionnel entre adultes et qui s’empressera de recommencer pour recréer le conflit. Et en même temps cela l’inquiète…

Les parents me demandent souvent : faut- il être d’accord sur tout ? Quelle richesse pour l’enfant de rencontrer deux adultes différents, apprendre à s’adapter à chacun, tout en affirmant ses propres besoins. Par contre, l’enfant a besoin de sentir un couple parental solide, auquel il peut s’accrocher pour grandir et un couple parental en conflit ne représente pas un socle sur lequel l’enfant peut se construire solidement.

Alors des parents pas d’accords ?

Oui, évidemment, mais les désaccords se gèrent sans l’enfant. Le couple parental va prendre le temps de se pencher sur les désaccords éducatifs et réfléchir à une décision consensuelle dans les situations de tension. « Ton papa pense que si tu ne manges pas tes légumes, tu ne dois pas avoir de dessert non plus. Car il pense que les légumes sont fondamentaux pour la santé. Moi, je pense que si tu ne veux pas en manger, c’est que tu n’en n’as pas besoin pour l’instant et donc que ce n’est pas grave si tu n’en manges pas. Nous ne sommes donc pas d’accord. Aussi nous avons tranché pour la règle : tu manges tes légumes si tu veux un dessert »

Se mettre d’accord sur une position commune sans cacher nos désaccords à l’enfant va apprendre à l’enfant la tolérance à la différence et la richesse de la diversité. Il sera plus équipé pour construire son identité propre. Bien sûr cela demande des temps de concertation et d’écoute mutuelle. Accepter que chacun ait sa vérité, qu’il n’y en n’ait pas une plus juste que l’autre. Difficile parce que l’émotionnel est là. Il faut apprendre à le gérer. Aussi parce que, lorsqu’il y a un moment paisible sans enfant, les parents ont envie de parler d’autre chose que des enfants ! Il va donc être indispensable de ritualiser ces temps de concertation. Un papa me disait qu’avec sa compagne ils se levaient une heure plus tôt le samedi et se faisaient un « délicieux petit déjeuner de calage sur les sujets à tension ».

Cela permet de poser ses limites à l’autre parent aussi : « Quand tu ris parce qu’il pleure, je le vis mal. Ça me touche très profondément. J’ai vécu cela petite et ça peut faire mal. Je te demande de ne pas le faire ou d’accepter que j’intervienne quand tu le fais ». Poser des limites aussi lorsque l’autre devient maltraitant car il s’énerve : « Es-tu Ok que je te demande de me laisser faire lorsque tu t’emportes ? ». C’est tellement plus facile d’en parler en dehors des situations de stress relationnel…

Et comme ce n’est pas facile de parler sans s’emporter ou d’écouter l’autre sans l’interrompre, choisir une méthode pour l’expression peut s’avérer indispensable (la méthode C.N.V par exemple : Communication Non Violente). C’est d’autant plus difficile quand on vit séparé : créer des espaces avec l’autre demande parfois de dépasser la souffrance liée à la séparation et la colère contre l’autre. Pourtant, et encore plus si les familles se sont recomposées, cela permet de rappeler la réalité du couple parental, responsable en priorité de l’éducation de l’enfant, même si ce n’est plus un couple de vie commune. Cela facilite aussi la posture des belles mères ou beaux pères qui accompagnent aussi l’enfant. C’est le couple parental qui va se caler sur les sujets de tension (comme l’usage des écrans chez l’un et chez l’autre par exemple). Il en va de l’équilibre de l’enfant.

Pour aller plus loin, voici quelques lectures: Les mots sont des fenêtres- Marshall B.Rosenberg / Il n’y a pas de parent parfait- Isabelle Filliozat/ T’es toi quand tu parles- Jacques Salomé
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