La gestion mentale, de quoi parle t-on ?
Auteur : Agnès Barry
L’intelligence humaine a été étudiée et « normalisée » par M. Binet, psychologue français, ayant travaillé sur l’élaboration du QI au début des années 1900. D’autres psychologues ont travaillé sur l’intelligence, en particulier Howard Gardner qui a élargi son interprétation en élaborant la théorie des intelligences multiples.
Antoine de La Garanderie, pédagogue français, a quant à lui réfléchi aux fonctions supérieures qui permettent les apprentissages et a créé la Gestion Mentale. Il s’agit d’une théorie qui explore, décrit et étudie les divers mécanismes et fonctionnements mentaux qui entrent en jeu de manière consciente dans tout apprentissage, qu’il soit concret ou abstrait. On parle alors de « gestes mentaux » qui sont au nombre de 5 : attention, mémorisation, compréhension, réflexion et imagination créatrice. Souvent considérés comme évidents ils sont rarement décrits et enseignés et aux enfants.
Qui n’a jamais dit à un enfant : « Fais attention, concentre-toi ! », sans lui expliquer comment faire ?
La gestion mentale vise l’autonomie de l’individu en le rendant conscient de ses habitudes mentales, afin qu’il puisse les utiliser au mieux et les enrichir, s’il le souhaite. Cette prise de conscience se fait par le dialogue pédagogique, c’est-à-dire un questionnement entre l’adulte et l’enfant. S’il peut être proposé de manière pointue par des professionnels, il est également possible de le faire avec son enfant de manière simple et abordable.
Pour ce faire, vous pouvez simplement questionner votre enfant sur une réussite, quel qu’en soit le domaine : construction d’une cabane, réalisation Légo, univers Minecraft, apprentissage d’une leçon, marquage de but en foot ou en rugby, réalisation d’un dessin, d’un croquis, … les possibilités sont infinies et propres à votre enfant. Il vous appartient simplement de la dévoiler et du lui faire exprimer.
Puis interrogez-le avec calme sur ses schémas mentaux, c’est-à-dire sur la manière dont il a procédé pour réussir. A-t-il vu des images dans sa tête ? Sont-elles dessinées ou comme des photos ? Fixes ou en mouvement comme un film ou un dessin animé ? Peut-être sont-ce plutôt des mots ? Avec sa voix ? Celle d’une autre personne ? Peut-il imaginer des sons non verbaux ? A-t-il eu besoin de dessiner, ou de bouger ? Partez de son schéma de réussite et transposez-le à l’apprentissage qui pose difficulté.
Exemple : un enfant avec plusieurs troubles d’apprentissage, dont un trouble de la coordination (dyspraxie) n’arrive pas à tracer les triangles isocèles (2 côtés de même longueur). Il aurait été assez évident de penser à des difficultés de manipulation des outils. Avec le dialogue pédagogique, nous avons pu établir la véritable raison et surtout comment il pourrait faire pour réussir. Pour opérer à la compréhension de son fonctionnement, il choisit comme réussite l’apprentissage du vocabulaire en anglais. Durant le questionnement, il explique que pour l’apprendre il se redit les mots dans sa tête ; il entend sa propre voix qui lui parle. Quand je lui demande s’il en fait de même pour tracer le triangle (se parler dans sa tête), il répond que non. Nous reprenons donc ensemble l’explication orale de la construction géométrique : « je trace un segment, je prends mon compas, je mesure l’écartement, …». Nous continuons pour le reste de la construction.
Premier point positif, la construction était comprise. Mais surtout il a pu acquérir une méthode à généraliser. L’objectif d’autonomie est atteint et la confiance en soi a augmenté.
Si vous voulez en savoir plus sur les différents gestes mentaux et surtout les découvrir avec vos enfants, vous pouvez consulter l’excellent « Je découvre comment apprendre», cahier d’exercices de l’édition Chronique Sociale. Une aventure imaginée pour explorer, comprendre et utiliser toutes les facultés nécessaires aux apprentissages. Adapté aux enfants à partir de 7 ans.
Agnès Barry est orthophoniste, spécialisée dans les troubles spécifiques de l’apprentissage. Elle est formée en éducation relationnelle et émotionnelle, à l’animation d’ateliers philos avec les enfants et en orthoyoga. Elle est également formatrice et conférencière.